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Éducation

Lien primordial, ce lien par lequel nous vivons

Comment expliquons-nous les différences relationnelles qui existent au sein des familles ? Comment pouvons-nous approcher et mieux comprendre les dynamiques conflictuelles, polémiques ou violentes constatées dans certains foyers ? Comment se fait-il qu’un enfant, quand bien même physiquement ou moralement violenté, puisse continuer à vouloir arranger, excuser, justifier, supporter ou réparer ses liens avec ses parents ? Beaucoup d’entre nous se sont posé ces questions. Force est de constater que malgré tout, beaucoup s’acharnent à vouloir maintenir à tout prix des liens familiaux même s’ils sont toxiques, voire délétères, pour ceux qui en souffrent, souvent en silence.

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Alliance, lien ou relation

L’une des pierres angulaires de ma pratique sur l’intersubjectivité se base sur une distinction entre les concepts d’alliance, de lien et de relation. C’est la raison pour laquelle, au cours de mes entretiens, je m’intéresse à la manière dont le sujet construit l’ordre du monde dans lequel il évolue, la place qu’il y occupe et celle que prend l’Autre dans ce même monde. J’ai pu esquisser une première définition du lien et de la relation dans un autre article paru sur Quotiz (lien vers l’article).

Tous mes écrits sont le fruit de mes élaborations et réflexions que je peux porter sur mes grilles de lecture et sur ma propre pratique. La théorie sans la pratique, la pratique sans la théorie, n’a que très peu de sens.

Lien versus Relation

Un lien, c’est ce qui nous attache, nous engage affectivement envers une ou plusieurs personnes, voire plus tard à une valeur, à un principe ou à une idéologie. La nature de ce qui nous attache initialement à nos parents est impalpable. Nous ne pourrions définir avec exactitude ce qui maintient ces liens qui nous influencent. Il s’agit des personnes auxquelles nous restons fidèles et envers lesquelles toute transgression de loyauté génèrerait potentiellement un grand malaise, une culpabilité, une honte couplée d’un effort de réparation ou de récupération. Dans le lien, il y a toujours quelque chose qui nous échappe et qui nous met en mouvement vers la personne désignée. Lorsqu’un lien est noué, celui-ci implique quasi systématiquement que l’autre détient quelque chose de précieux qui nous appartient : le pouvoir de nous influencer, de capter notre attention, de nous pousser à l’adaptation ou à la transformation. Dans certains cas, ce lien est positif et réciproque, mais dans d’autres, ce lien peut être négatif ou asymétrique.

A contrario, la relation n’engage personne en dehors de la simple interaction observable entre deux personnes : pas d’influence sur le temps, pas d’adaptation durable, pas d’affect, pas d’amour, pas d’engagement, pas de loyauté. Cela dit, les relations sont nécessaires, non seulement parce qu’à travers elles, nous nouons des liens, mais également parce que nous ne pouvons pas nouer de liens avec tout le monde de manière convenable. Bien qu’il existe une propension à offrir notre lien de manière plus ou moins indifférenciée, il importe de ne pas gaspiller cette capacité suffisamment précieuse en l’accordant à quiconque, pour de mauvaises raisons ou par influence. Il s’agit pourtant de s’en rendre compte pour s’offrir la possibilité de choisir nos liens futurs avec parcimonie et qualité.

Le lien n’est pas toujours sans danger

Être en lien est relativement énergivore selon les situations. C’est ce qui peut nous pousser à accepter ou à faire des choses qui d’ordinaire toucheraient à l’inacceptable. Mais c’est aussi le lien qui nous incite à vouloir comprendre l’autre, et à vouloir résoudre un conflit. Lorsque le lien est négatif ou non réciproque, c’est-à-dire que l’autre est uniquement en relation, ce lien devient extrêmement énergivore et dangereux pour le maintien ou la construction d’un équilibre psychique ou d’une liberté partagée. La personne dans le lien passe alors souvent pour folle et nourrit par la même occasion l’équilibre psychique de l’autre. L’autre n’aura qu’à profiter volontairement ou involontairement de ce déséquilibre pour ne pas se penser fou lui-même.

La dyade enfant-parent ou le lien primordial

Il existe cependant un lien auquel nous ne pouvons échapper et qui peut être à la source de beaucoup d’états de mal-être futurs. Enfant, aucun choix ne nous est laissé. L’enfant est naturellement assujetti à son preneur de soin. Tout enfant construira ainsi les premiers sens de son existence à travers le prisme de ce que lui renvoient ses propres parents. C’est à travers ce qui se joue dans son système familial qu’il construira ou non ses premières catégorisations, entre ce qu’il est et ce qu’il n’est pas, ce qu’il peut et ce qu’il ne peut pas, ce qui est normal et ce qui ne l’est pas. Et ce, avant même qu’il apprenne l’existence d’un monde plus vaste et qu’il se confronte à la « réalité commune ». Autant dire que ses premières constructions du monde, de la place qu’il y occupe et de ses modalités de rapport à l’Autre seront « conditionnées » par son système familial.

À travers leurs propres représentations de ce que sera leur futur enfant, les parents construisent déjà, avant même sa naissance, leurs attentes ainsi que la place qui lui sera disponible. Notamment à cause de leurs présupposés sociaux, comme le genre normatif lié au sexe de l’enfant, les parents seront, par exemple, tentés de peindre la chambre de leur futur enfant en bleu si c’est un garçon ou en rose si c’est une fille. D’autres facteurs entrent en ligne de compte, comme leurs propres vécus de jeunesse, leurs rapports avec leurs propres parents, leurs attentes et aspirations, ou encore leurs propres agendas relatifs au projet même d’avoir un enfant. Ainsi, l’enfant né occupera une place qui lui est préexistante et remplira une fonction dans un système familial qui lui est également préexistant.

L’univers familial dans lequel l’enfant naît est ainsi primordial dans son développement psychique. Son immaturité fonctionnelle l’oblige à dépendre de son preneur de soin. Comprenez maintenant pourquoi le rapport à nos propres parents est souvent abordé en psychothérapie, ironiquement, le plus souvent amené par le patient lui-même fréquemment réticent à cette idée. Ce n’est pas que ce rapport vous définisse, mais il raconte aussi votre histoire.

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S’il y a donc bien un lien inévitable, il s’agit du lien que l’enfant nouera avec ses preneurs de soin. Ce lien, je le nomme plus délibérément un lien primordial. Ce lien est littéralement nécessaire et vital à tout enfant. Les enjeux néfastes du manque de continuité ou de cohérence affective dans la relation enfant/preneur de soin sont déjà bien connus en psychologie et psychiatrie sous le nom de « relation anaclitique ».

Un lien enfant-parent n’est pas toujours réciproque

Comprenons bien : alors que le parent noue immanquablement un lien avec ses propres parents, il n’est pas exclu qu’à l’inverse, il ne noue aucun lien avec son propre enfant. Plusieurs raisons peuvent alors entrer en ligne de compte.

L’enfant né arrive dans un contexte familial ne pouvant l’accueillir affectivement, par accident ou pour de mauvaises raisons. Par exemple, à travers la naissance d’un enfant, il arrive que des personnes souhaitent en réalité sauver leur couple. La charge et l’attention dont l’enfant aura besoin finiront par séparer les parents, ou bien l’enfant lui-même sera délaissé une fois sa fonction accomplie. Il se peut que l’enfant soit souhaité pour de toutes autres raisons, et que la place qui lui est alors laissée soit tellement restrictive et fonctionnelle que l’enfant devient un simple objet répondant aux envies du parent.

Toujours est-il que tous les enfants, à des exceptions près, trahiront l’agenda de leurs parents pour leur propre besoin de développement identitaire. C’est normal et souhaitable, notamment à l’adolescence, mais bien avant également. Le plus beau des cadeaux qu’un parent puisse offrir à son enfant est justement de lui signifier la transgression, sans que cette trahison puisse mettre à mal leur attachement réciproque. En somme, l’enfant dépassant clairement une limite devrait recevoir le pardon de son parent.

Dans le cas de « parents toxiques », aucune transgression ne sera tolérée. Chacune d’elle ira avec son lot de coercitions physiques ou morales à l’encontre de l’enfant. Les violences conjugales (même sans violences parentales) attaquant les repères de l’enfant sont tout aussi néfastes pour l’enfant qu’une violence directement dirigée sur lui. La violence faite à l’un de ses parents par son autre parent est et restera toujours une violence faite à l’enfant.

Les violences conjugales, même sans violences parentales, sont et resteront toujours des violences faites à l’enfant.

À remarquer que tout dépendra de la gravité « objective » de la transgression. Certains parents peuvent aussi avoir besoin de soutien pour leur permettre de faire la part des choses entre les besoins de l’enfant et les problèmes inhérents au couple. Après tout, l’enfant n’est pas un objet, mais un être vivant qui construira également ses propres modalités de fonctionnement, malgré les compétences suffisantes de ses parents.

Ce lien primordial fait partie de ces enjeux cliniques qui nous rendent dépendants de nos parents et qui moduleront notamment notre manière de nouer des liens dans le futur, ou au contraire, de ne pas pouvoir en nouer du tout.

Ce premier lien est une question de survie. Pour insister sur ce caractère vital, je vous propose trois études qui m’ont aiguillé vers cette conceptualisation du lien primordial.

L’enjeu de la langue parlée originelle

L’Histoire nous apporte deux expériences qui ont retenu mon attention depuis quelques années. Elles illustrent la nécessité du lien dont l’enfant a besoin pour « désirer ou avoir envie de vivre ». Bien qu’il m’en coûte de vous les exposer pour leur caractère totalement abject, elles me permettront de vous illustrer ce qui précède, ainsi que les conséquences de ce qui est souvent rencontré dans ma pratique.

Dans la première moitié du XIIIe siècle, l’Histoire raconte une période prise dans une suite de croisades politico-religieuses au Proche-Orient. Pas moins de trois croisades (Ve, VIe et VIIe) ont été menées pendant cette seule période. L’Empereur de l’Empire romain germanique Frédéric II de Hohenstaufen (1194-1250) organisa l’expédition de la sixième croisade (1228-1229) pour reconquérir les territoires du royaume de Jérusalem perdus depuis la fracassante conquête de Saladin (1138-1193), Sultan d’Égypte et premier dirigeant de la dynastie ayyoubide. Il s’agit donc d’un contexte de campagnes militaires motivées par l’accès au « pèlerinage armé des chrétiens en Terre Sainte » pour aller prier au Saint-Sépulcre, le tombeau du Christ, dans la Vieille ville de Jérusalem. Dans ce contexte géo-politico-religieux, Frédéric II a voulu connaître quelle était la langue que développeraient des bébés s’ils se développaient sans contact linguistique. L’enjeu était de connaître la langue originelle de l’être humain : le grec, le latin, l’hébreu, l’arabe ou simplement, la langue maternelle de leurs parents. Pour ce faire, il ordonna la saisie de plusieurs orphelins et commanda aux gouvernantes et aux nourrices de veiller à leur hygiène et à leur nourriture, sans jamais leur adresser la parole ni les caresser. Ainsi, l’expérience devait fournir les besoins primaires de l’enfant, nourriture et hygiène, et permettre ainsi l’émergence « naturelle » d’une langue.

Pour résultat, la langue de Dieu n’est jamais apparue, ni aucune autre langue. Pire, sans la possibilité de nouer un lien avec leur preneur de soin pour dépasser la simple relation basale, les enfants sont tous tristement décédés durant leur enfance. La simple satisfaction des besoins primaires des enfants, nourriture et hygiène, semblait ne pas suffire pour leur insuffler une place qu’ils pourraient occuper tout en leur signifiant le désir, la nécessité ou l’envie de s’y accrocher.

La deuxième expérience permettra de préciser davantage les enjeux de cet accrochage et la nécessité des interactions affectives entre l’enfant et son preneur de soin.

Au début du Livre II des Histoires, Hérodote (historien, 480-425 AEC) nous raconte une expérience menée par le dernier des Pharaons, Psammétique III (VIe siècle AEC). Il raconte un débat tenu entre les Égyptiens et les Phrygiens (une région de la Turquie actuelle) où il était question de savoir qui était le peuple le plus ancien de la terre. Pour trancher, le Pharaon Psammétique III mit en place une expérience décisive. Il prit deux nouveau-nés qu’il sépara de leurs parents biologiques, et les confia à un berger. Le berger se chargea de les élever à l’écart de la société égyptienne et phrygienne, et les confia à une chèvre qui en prit soin seule. Le berger ne devait pas s’interposer dans le processus, ni leur adresser la parole, ni intervenir dans les relations entre la chèvre et les enfants. Comme Frédéric II, Psammétique III souhaitait ainsi créer les conditions propices à l’émergence d’une langue sans influence humaine extérieure. Après deux ans, les deux malheureux enfants prononcèrent le seul et même mot : Becots (pain en phrygien).

Au-delà de la victoire phrygienne au détriment des enfants, la conclusion voudrait que la faim ait été le moteur de l’émergence du langage. Plus encore, une des différences notables qui existe entre les expériences ignobles de Frédéric II et Psammétique III concerne la capacité de la chèvre à pouvoir offrir aux enfants le soin affectif dont ils ont besoin avant même le développement du langage. Le fait même que les enfants aient pu entretenir un contact chaleureux avec leur preneur de soin, quoiqu’animal, leur a sans doute permis de survivre dans le lien qui les unissait. Contrairement à la première étude, les relations intersubjectives partagées leur ont offert un sens partagé à leurs existences. Ce contexte d’interaction partagée aurait pu contribuer à la construction précoce d’un ordre du monde, d’un rapport à ce monde et de la place que pouvait occuper l’Autre dans ce même monde, permettant ainsi aux enfants de survivre. Je ne saurais dire si dans ce cas le lien était réciproque, mais ce qui est sûr, c’est que la chèvre a fait un meilleur boulot que les deux autres hurluberlus.

Concernant cette dernière remarque sur l’importance du lien affectif primordial, un chercheur psychologue américain, Harry Harlow (1905-1981), a réalisé une célèbre étude dans les années 50, mais cette fois avec des singes.

Mère artificielle pour mère porteuse

Harlow a construit deux « poupées » artificielles, des mères inanimées servant de substituts aux bébés singes. L’une était douce, faite en bois recouvert de caoutchouc souple, d’un tissu spongieux, et dégageait de la chaleur. L’autre mère artificielle était rude et froide, réalisée en treillis métallique nu, mais offrait du lait aux bébés. Contrairement à la croyance psychanalytique de l’époque selon laquelle les bébés s’attacheraient aux mères qui les nourrissent, les bébés singes ont passé la plupart de leur temps à embrasser la mère en tissu.

Ensuite, l’équipe d’Harlow disposa les bébés singes dans deux configurations : un test de peur et un test d’exploration. Dans la première, un objet étrange était disposé dans la pièce et dans la seconde, un objet connu pour susciter l’attention et la curiosité des singes. Dans les deux cas, les singes ayant été élevés avec la mère douce osaient explorer leur environnement en prenant pour base sécurisante leur mère artificielle (cf. attachement sécure ; Bowlby). Quant aux singes élevés par la mère froide, ils n’exploraient pas leur environnement, et dans les deux configurations, ils restaient terrifiés aux pieds de leur mère artificielle (cf. attachement insécure ; Bowlby).

En outre, il fallait constater que fort malheureusement, tous les singes élevés par des mères artificielles douces ou froides étaient devenus d’étranges adolescents. Ils n’étaient pas attirés par les autres singes, ils restaient seuls, fixant le vide, et ne rentraient aucunement en interaction avec les autres. De plus, les femelles ayant été fécondées in vitro devinrent des mères horribles, punitives, excluantes et violentes. Les mères artificielles n’avaient pas pu les éduquer et les rendre sociables.

Harlow soulève une question pertinente quant à l’évolution de ces singes en « adolescents étranges ». Il met en évidence que le réconfort seul ne satisfait pas au développement de l’enfant sur le plan cognitif et affectif. Dans le cas des singes, le réconfort se joue seulement dans l’interaction imaginaire du bébé vers son preneur de soin. Quand bien même inertes, le cramponnement du bébé à la poupée a permis cette interaction. Par contre, l’absence de réaction de la poupée met en évidence l’importance de la réciprocité affective. Le réconfort offert par la poupée douce n’est pas suffisant car l’interaction n’est qu’« interprétative », asymétrique. Ainsi, peu importe la poupée, le singe noue un lien primordial mais qui malheureusement ne lui est pas rendu.  L’absence de réciprocité affective est un élément significatif qui a pu mener les singes à devenir d’étranges adolescents.

Dans cette même logique, dans l’histoire rapportée par Hérodote, la chèvre est vivante. En plus du réconfort offert aux deux enfants, ses réactions et donc leurs interactions, pourraient éventuellement avoir offert aux enfants un dénouement différent. Pour l’enfant, le fait de se lier au mauvais objet et plus particulièrement à un « mauvais preneur de soin » peut conduire à une rupture de ce qui peut être considéré comme des comportements acceptables. Les apprentissages, les interactions, l’équilibre entre les limites et l’affection, les tâtonnements ainsi que les confrontations à l’environnement sont autant d’éléments importants au bon développement de l’enfant que simplement le réconfort, la protection ou la satisfaction des besoins primaires (nourriture et hygiène).

En guise de conclusion

De ce qui précède, je pense avec raison qu’il puisse y avoir des substituts efficaces à la mère, y compris le père, ou tout autre preneur de soin capable de remplir cette première fonction de lien primordial pour autant que le preneur de soins assure la réciprocité du lien.

Cela explique mon utilisation du terme « preneur de soin » ou « parent » au détriment de « mère » ou de « père », car rien n’indique qu’un couple de parents devrait être composé exclusivement de deux personnes de sexe opposé. Ni qu’un parent seul serait incapable d’être suffisamment bon pour l’épanouissement de son enfant. En outre, les appellations de « père » ou de « mère » en psychologie sont à comprendre et à contextualiser, car elles font davantage référence aux représentations symboliques de la Loi et de l’Affection plutôt qu’au genre ou au sexe de chaque parent.

S’il y a bien un lien sur lequel nous nous interrogeons trop peu souvent, c’est celui que nous avons noué avec nos parents. Le travail à réaliser sur ce lien est tout aussi complexe et persistant que celui à nouer avec une autre personne qui serait également à la source de violences physiques ou morales. Lorsqu’il n’est pas réciproque, ce lien peut être extrêmement délétère pour le développement d’un enfant, mais également pour son épanouissement affectif pour le restant de sa vie. Nos expériences de notre prime enfance sont des plus importantes, et préludent potentiellement à notre manière d’évoluer et de nous envisager dans notre environnement : ce que nous sommes, notre bien-être, notre équilibre affectif, nos rapports à l’Autre, et les cartes que nous mettons entre les mains des celles et ceux qui partageront notre vie.

Le lien primordial nous met, de facto, dans une première dynamique intersubjective de dépendance à nos parents. Il advient donc aux parents qu’il soit réciproque.

Comprendre et observer la manière dont s’articulent les dynamiques filiatives est le premier pas vers une émancipation affective des sources de violences physiques ou morales qu’un ou plusieurs parents peuvent exercer. Sans tiers intervenants, ces violences sont, la plupart du temps, continues, stables, et durables dans l’espace-temps intrafamilial et extrafamilial. Elles ont des effets néfastes sur l’équilibre cognitif et affectif des enfants chez qui les conséquences et les restes se retrouvent encore sous différentes formes une fois devenus adultes. Même dans un système hiérarchisé comme celui de la famille, une forme de réciprocité affective, dans les limites des relations interdites, est de mise.

Enfin, les dynamiques intersubjectives familiales sont de nature toujours plus complexe qu’elles n’y paraissent. De plus, travailler sur un lien dit filiatif vertical (enfant-parent) est très éprouvant lorsque cela nécessite d’ouvrir les yeux sur ce que peuvent être nos parents. Pourtant, nous faisons souvent l’impasse sur le simple fait que nos parents sont des personnes, des individus, des sujets, tout comme nous pouvons l’être. Cela implique que les mêmes approches et considérations cliniques peuvent s’appliquer à eux, autant qu’à nous. Un long travail d’acceptation et de démystification est parfois nécessaire pour atténuer les impacts affectifs sur notre propre bien-être.

Texte rédigé par Tim T. Stroobandt

Bibliographie

Kissel M. (2005). Des origines du langage “ L’Expérience de Psammétique ” Hérodote Histoires, II, 2. Journées de l’Antiquité 2005-2006, Université de La Réunion, Saint-Denis, La Réunion. pp.87-95.

Maalouf, A. (1983). Les Croisades vues par les Arabes. Paris : LCL.

Pato, E. (2008). À la recherche de la langue maternelle, au XIIIe siècle. Boletín de investigación y debate. Études hispaniques, Université de Montréal, 10.

Vicedo, M. (2010). The evolution of Harry Harlow: from the nature to the nurture of love. History of Psychiatry, 21(2) 1–16.

La musique, un langage universel en 21 exemples

Là où il y a de l’humain, il y a de la musique. Vous pouvez l’écouter partout sur la planète sans devoir recourir à un interprète. À l’aide d’extraits sonores, cet article illustre 21 manières de pouvoir s’accorder, quelles que soient votre langue, votre culture et vos compétences musicales. Une expérience unique et originale. Je vous souhaite un très agréable moment d’écoute…

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Selon Marcel Proust dans La Prisonnière, la musique est peut-être l’exemple unique de ce qu’aurait pu être la communication des âmes s’il n’y avait pas eu l’invention du langage, la formation des mots ou l’analyse des idées.

Quel est donc ce miracle, et à partir de quand les vibrations acoustiques sont-elles musique et non bruit ? Un chat qui se hasarde sur le clavier d’un piano crée-t-il de la musique ? Sans doute que non, et si la musique représente le langage des âmes, la définir paraît un exercice vraiment difficile tant elle renvoie à la complexité de notre nature dans ses multiples aspects neurosensoriels, rationnels, émotionnels et spirituels. Je vous invite plutôt à un tour d’horizon avec 21 expériences concrètes, afin de vous permettre d’en percevoir les différentes dimensions. À vos écouteurs !

Quelques conseils avant l’écoute des plages musicales : pour éviter une cacophonie, mettre l’écoute sur pause avant de passer à la lecture du morceau suivant (en cliquant sur la partie gauche du lecteur) ; appuyer sur la croix en haut à droite pour faire disparaître l’invite de Spotify et voir réapparaître la référence du morceau ; de simples écouteurs permettent d’apprécier mieux la diffusion stéréophonique ; ne pas hésiter à écouter l’extrait proposé pendant la lecture du texte correspondant ; la musique est multidimensionnelle et s’apprécie en écoutant séparément chaque note, chaque timbre de voix ou d’instrument, chaque accord, chaque tempo ; et pour terminer, en écoutant les extraits grâce aux widgets de la plateforme Spotify, vous acceptez les conditions générales de ladite plateforme que vous pouvez lire en cliquant sur le lien suivant : Widget Terms of Use

1. Le silence

Au risque de vous surprendre, commençons par le silence. Mais attention, le silence absolu n’existe pas sur terre. En effet, une ambiance calme perçue comme silencieuse représente malgré tout 30 à 40 dB. Il y a donc « matière » à écouter le silence.

Le silence a un effet bénéfique sur le stress, et permet de méditer, d’écouter sa musique intérieure, et par l’introspection, de communiquer avec son âme.

Illustrer le silence avec une plage sonore serait absurde. C’est pourquoi je vous propose d’écouter ce qu’on appelle un bruit rose. Il est parfois utilisé comme thérapie sonore pour étouffer la perception des acouphènes chez des personnes réellement perturbées par des sifflements ou bourdonnements d’oreille.

2. Les compositions de la nature

Elles sont tellement variées et s’offrent gratuitement à nos oreilles dès que nous nous éloignons des villes. Tantôt de source animale comme les chants d’oiseaux, tantôt provoquées pas des phénomènes physiques comme l’épanchement des vagues de la mer, elles sont pour la plupart apaisantes. Nous pouvons être touchés par le bruit des arbres : en forêts ou solitaires, leurs mélodies nous parlent… Parfois les manifestations sonores de la nature nous font craindre leur force, à l’instar d’un coup de tonnerre ou de l’éboulement d’une avalanche.

Laissez-vous emporter quelque temps par la douceur et les vertus relaxantes des gazouillis d’oiseaux dans l’extrait ci-dessous…

3. La perception tactile

La musique s’écoute également par la peau ! Les pizzicati dans les notes graves d’une contrebasse procurent une sensation de résonance dans le corps et confèrent à certains morceaux de jazz ou de musique classique une dimension profonde et chaleureuse. Les bols tibétains diffusent eux aussi leurs vibrations sonores à travers le corps lorsqu’ils sont utilisés pour un massage sonore bienfaisant.

4. L’approche rythmique

Le rythme est une musique en soi. D’ailleurs, la discographie révèle un répertoire important d’oeuvres pour percussions seules. Les variations rythmiques de frappes, chocs et battements d’objets ou d’instruments peuvent nous emporter, et même nous envoûter. Nous pouvons éveiller un enfant à la musique dès son plus jeune âge, à l’aide de jouets sous forme de hochets, maracas et petits tambours, ou plus simplement, en le laissant frapper des objets familiers.

Tous les genres musicaux sont susceptibles d’exploiter les empreintes rythmiques, et certains peut-être plus que d’autres, comme les musiques africaines et orientales. L’extrait ci-dessous reprend une composition de Brent Lewis qui a traversé l’Afrique pour y étudier les racines de la musique africaine.

5. L’approche mélodique

C’est probablement celle qui vient à l’esprit en premier lieu lorsqu’on évoque la musique. Une mélodie peut se jouer ou être chantée une seule note à la fois. Elle se mémorise d’ailleurs assez facilement. Certaines sont tellement populaires et ancrées dans notre mémoire collective que peu de gens se demandent encore qui en sont les compositeurs officiels.

Connaissez-vous par exemple la petite chapelle à Oberndorf en Autriche ? Elle commémore un chant de Noël célèbre, composé sur un accompagnement de guitare en 1818 par Franz Xaver Gruber. Cette mélodie a fait rapidement le tour du monde et l’oeuvre est inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO. Je vous propose d’en écouter une version pour illustrer combien une mélodie peut être douce et communicative.

6. Le discours harmonique

Trois petites notes suffisent à elles seules pour susciter des résonances émotionnelles différentes selon qu’elles forment un accord en mode mineur ou majeur. Une coloration mineure ouvre son monde intérieur et inspire un sentiment de douceur, de tendresse, de mélancolie, d’inassouvissement, et parfois de tension et d’orage. La tonalité majeure, plus extravertie, nourrit quant à elle une sensation de soulagement, d’allégresse, d’accomplissement et de grandeur. De toute évidence, l’humain est sensible au discours harmonique.

C’est ici l’occasion de rendre hommage au compositeur Franz Schubert qui, sur le plan harmonique, oppose de manière constante les modes mineur et majeur. Ce faisant, il démontre la magnificence des modulations musicales.

7. L’harmonie malgré les différences

Des mélodies distinctes peuvent se mélanger et former des accords harmonieux. Vous rappelez-vous avoir jamais chanté Frère Jacques sous forme de canon, où chaque voix répète exactement la même chanson de manière différée ?

Dans Rigoletto de Giuseppe Verdi, il y a dans le 3ème acte un quatuor resplendissant, constituant d’ailleurs un florilège des oeuvres d’opéra. Chaque voix apporte sa caractéristique musicale propre, et l’ensemble vous procure de véritables frissons au moment de l’apogée. L’extrait suivant vous permet d’écouter Bella figlia dell’amor à votre guise, en vous focalisant lors de chaque écoute sur une voix en particulier pour votre plus grand plaisir.

8. Le discours dissonant

Dissonance ne signifie pas nécessairement cacophonie. Au contraire, elle peut alimenter des envolées lyriques et romantiques, exprimant à sa façon les tourments de l’âme, ou encore, l’opposition entre ce qui est espéré et la réalité. À ce titre, les Vier Letzte Lieder (Quatre Derniers Chants) de Richard Strauss peuvent être une découverte particulièrement belle et intéressante. Je vous en propose un extrait…

9. La mémoire du passé

Chacun a son histoire gorgée de souvenirs heureux et de chagrins. Une personne, un lieu, une circonstance… Notre mémoire émotionnelle est ainsi faite : une musique entendue par hasard à la radio ou dans une boutique est capable de faire resurgir instantanément, comme par magie, une réminiscence enfouie au plus profond de soi, et nous faire plonger automatiquement dans le passé.

Il est impossible d’illustrer ceci par un exemple universel, car chaque personne dispose de ses propres expériences émotionnelles.

J’ai choisi l’extrait que voici pour rendre hommage à Charles Aznavour, un auteur et compositeur capable d’interpréter ainsi son titre « La bohème« , au point de réveiller en nous – surtout les moins jeunes – un sentiment de tristesse causé par l’éloignement de notre jouvence , car « la bohème, ça voulait dire… on a vingt ans… ».

10. Faire écho à l’émotion du moment

N’avez-vous jamais fredonné une mélodie selon votre état d’humeur ? Oui, la musique peut sublimer un sentiment de joie ou de tristesse, et on peut aussi l’aimer dans sa solitude comme une tendre amie ou en guise de ressourcement intérieur.

La musique permet aussi de s’évader ou de se relaxer, et nous fait ressentir des émotions si différentes selon l’instant ou le morceau choisi. L’extrait suivant a été joué comme finale d’une pièce de théâtre où les deux protagonistes dansaient dans la joie de leur amour et complicité.

11. Faire émerger de l’émotion

La musique n’est pas une personne, et pourtant, elle est capable de distiller des émotions, parce que l’être humain y fait résonance. Sur grand écran, elle occupe une place importante, et bien souvent, on se souvient d’un film car on a aimé sa musique, et surtout l’émotion qu’elle a sublimée en soi. Ainsi, elle confère à l’image, au thème et à l’espace une dimension supplémentaire en les amplifiant par le biais d’un langage émotionnel. Les producteurs d’émissions radiodiffusées ou télévisées l’ont bien compris : ils consacrent tout le budget et le soin nécessaires pour le générique musical de l’émission qui devient en quelque sorte la signature de leur programme.

Radu Mihaileanu, le réalisateur du film « Vas, vis et deviens », a été bien inspiré en confiant à Armand Amar la composition de la musique de ce long-métrage véritablement poignant, racontant l’histoire d’un jeune garçon séparé de sa mère et de son pays, perdant ainsi ses racines les plus profondes… Dans cet extrait, les notes graves du violoncelle illustrent de manière déchirante les larmes silencieuses, tandis que les notes plus aiguës du violon représentent les lamentations de l’âme, le tout étant rythmé par les pizzicati d’une contrebasse pour évoquer les battements d’un coeur affligé.

12. Inciter à la bonne humeur

Une humeur n’est pas une émotion en tant que telle. Isabelle Filliozat, dans son ouvrage « Que se passe-t-il en moi ? » définit l’humeur comme un état passager, une ambiance affective qui colore le vécu et qui dure de quelques heures à quelques jours.

Certaines chansons nous incitent à la bonne humeur lorsqu’elles répondent à certains critères, comme l’utilisation d’une tonalité majeure (voir plus haut), l’expression de paroles positives et un rythme au tempo entraînant. Ne nous privons donc pas de l’extrait suivant :

13. Partager ce qu’on aime

Il est intéressant de se demander pourquoi on aime partager « ce » qu’on aime avec « ceux » qu’on aime. Peut-être est-il rassurant pour l’être humain de se sentir appartenir à un groupe ou à une communauté, et de concrétiser ce fait par différents moyens de communication. Parmi ceux-ci, le partage réciproque de morceaux de musique, et l’émotion qu’ils procurent, permettent de renforcer ses liens avec son « clan ». Pour les mêmes raisons, et cela concerne aussi d’autres domaines comme l’habillement ou la décoration, certaines personnes accordent de l’importance à ce qui est « tendance », un mot cher au marketing. Dans ce qui précède, le plus important n’est-il pas de rester soi-même et de déterminer pour son propre chef ce qui est de « bon » ou de « mauvais » goût, et de forger ainsi sa personnalité ?

Avec leur titre « Despacito » (2017), Luis Fonsi et Daddy Yankee ont ainsi battu le record absolu sur Youtube, avec pas moins de 7 billions de vues, de quoi surpasser largement Whitney Houston, avec sa chanson « I will always love you » (1992) qui a atteint récemment 1 billion de vues (source Billboard , publiée le 27/10/2020).

Assurément, ce single latino-américain aux paroles « caliente » et son clip vidéo ont fait l’objet d’un nombre historique de partages.

14. L’exaltation grâce au concert en live

Il suffit d’écouter l’extrait suivant pour se rendre compte à quel point un spectacle en public peut enthousiasmer l’assistance. C’est bien plus que simplement y croiser des gens partageant le même centre d’intérêt. L’artiste, lui-même transporté par la chaleur du public, comme un phénomène de résonance, démultiplie les effets de sa prestation.

15. La méditation

Comme le disait Éric-Emmanuel Schmitt au cours d’une interview accordée à Evene.fr en octobre 2005, « la musique nous aide à construire nos vies spirituelles, nous apaise, nous console, nous redonne de la joie, nous rend allègre, nous fait danser, chanter. »

Ceci est particulièrement vrai lorsque nous écoutons le chœur des moines bénédictins de Chevetogne dans l’extrait musical ci-dessous : saluons la beauté de ce chant polyphonique aux vertus apaisantes et réconfortantes.

16. La concentration

Est-il possible de nous concentrer mieux sur nos tâches lorsque nous écoutons de la musique ? Certains diront oui, comme par exemple lorsqu’ils lisent un livre ou lorsqu’ils exécutent un travail répétitif. D’autres au contraire répondront que la musique les empêche de réfléchir, de mémoriser ou d’être créatifs. Des élèves étudient avec des écouteurs dans les oreilles, tandis que d’autres utilisent des casques anti-bruits.

Mais que nous apprennent les neurosciences cognitives sur le sujet ? Lors d’une interview accordée à Musiq3 en octobre dernier, le professeur Emmanuel Bigand, éminent spécialiste dans ce domaine, explique que « la musique active tout un ensemble de réseaux qui vont des couches corticales jusqu’à des couches très archaïques du cerveau ». Il évoque même une « symphonie neuronale » capable de produire des effets bénéfiques sur le cerveau et de « booster notre fonctionnement cognitif en général ».

En effet, le cerveau est bondé de neurones interagissant les uns avec les autres par le biais de neurotransmetteurs qui sont en réalité des médiateurs chimiques. Selon leur nature, ils peuvent avoir un effet tantôt inhibant, tantôt excitateur. Ainsi, selon Emmanuel Bigand, une musique qui nous est agréable activera les circuits de la récompense. Le cerveau libère alors de la dopamine procurant une sensation de plaisir ou de bien-être, plus favorables à la concentration que le stress ou l’anxiété. En outre, la satisfaction libère de la sérotonine, autre médiateur chimique qui favorise la concentration.

Mais on ne peut pas isoler ainsi les retentissements de nos seules perceptions auditives, encore faut-il tenir compte de l’impact de nos résurgences intérieures, comme notre mémoire émotionnelle ou notre motivation, capables d’influencer positivement ou négativement nos capacités cognitives.

Tout cela est profondément propre à l’individu à un moment donné. Somme toute, chacun est différent et apprendra par lui-même quelles sont les musiques susceptibles de lui apporter, selon les circonstances, un bénéfice en termes de concentration. Tout l’art consiste alors à ne pas se laisser envahir par ce que j’appellerais une « cacophonie neurochimique », mais de se laisser insuffler cette « symphonie neuronale » chère à Emmanuel Bigand.

Attention quand même, les paroles d’une chanson et le timbre de la voix humaine risquent plutôt de perturber votre attention : si vous devez vous concentrer, mieux vaut alors choisir une musique instrumentale ou orchestrale. Pour cette raison, j’apprécie particulièrement les œuvres du répertoire baroque aux effets généralement plus réguliers, comme dans l’exemple que voici :

17. Versions et reprises

Concernant les versions, j’aime comparer différentes interprétations d’une même oeuvre de musique ancienne sur base d’une partition identique. Ma préférence dépendra de plusieurs facteurs : la touche artistique de l’interprète, le tempo emprunté, la qualité de l’enregistrement, le rendu du son avec la qualité des basses, etc.

Et puis, il y a les reprises… Les chansons et pièces musicales populaires sont parfois reproduites par d’autres artistes que ceux d’origine, ce qui nous permet alors de les explorer d’une façon nouvelle, ou de préférer l’oeuvre originale. Nous pouvons aussi découvrir pour la première fois un morceau ancien grâce à la sortie de sa reprise.

Par l’exemple ci-dessous, je veux rendre hommage à deux artistes belges, le chanteur Salvatore Adamo et le rappeur Eddy Ape. Ils interprètent ensemble cette ancienne chanson d’Adamo intitulée « Les filles du bord de mer », mais revue par le rappeur avec, selon moi, un talent exceptionnel. Un grand bravo à tous les deux !

18. Le concours musical

En général, les concours rencontrent pas mal de succès. Nous les connaissons dans différents domaines : le sport, la littérature, le jeu, la beauté, la politique, l’éloquence, etc. Voir concourir des protagonistes – individuellement ou en équipe – a ce petit côté excitant, surtout lorsqu’ils excellent et rivalisent dans un domaine qui nous passionne. La passion, ça y est, le mot est lâché !

La musique n’y fait pas exception ! Qui ne connaît pas l’émission télévisée « The Voice » ? Les mélomanes avertis aimant la musique classique connaîtront certainement, parmi tant d’autres, le « Concours Reine Elisabeth » à Bruxelles, ou encore le « Concours international Mozart » du Mozarteum à Salzbourg. Dans un autre genre musical, il y a par exemple à Paris le « Concours national de jazz de la Défense ». Au total, tous les concours musicaux de par le monde nous permettent d’écouter des musiques exécutées par des interprètes de grande qualité.

Voici un deuxième cocorico belge avec l’extrait ci-dessous, provenant du film « Le Maître de musique » réalisé par Gérard Corbiau, dans lequel un des élèves du « Maître » s’opposera au protégé de son rival à travers un concours lyrique :

19. La musicothérapie

La musicothérapie, qu’elle soit active, réceptive ou de détente psycho-musicale, tisse un lien entre le sujet et son thérapeute, et permet d’explorer différents domaines de la rééducation. Dans certains cas, elle permet d’atténuer la sensation de douleur.

2O. Les genres musicaux

Parmi les différentes expressions de la musique, le style musical est le reflet d’une partie de nous. Avez-vous jamais compté le nombre de genres musicaux ? Pour être honnête, je pensais qu’il y en avait tout au plus une (petite) cinquantaine… Grand maximum ! Citons le jazz, le rock, la musique classique et baroque, l’opéra, l’électro, les musiques du monde, la chanson française, la musique d’ambiance, le new age, le reggae, le bossa nova, le swing, le chant chorale, le tango, la valse, …

Une petite visite sur Wikipedia m’a littéralement stupéfait : à l’heure où je rédige cet article, j’ai pu y dénombrer 709 genres musicaux différents ! De quoi satisfaire tout le monde… et je trouve cela extraordinaire.

Je ne pourrais pas vous faire écouter chacun des genres musicaux, mais j’ai choisi un extrait d’un genre que je n’ai pas cité plus haut, intitulé en anglais la « soul music », ce qui signifie la musique de l’âme…

21. Sa propre composition

Avant de poursuivre, je tiens à remercier tous les auteurs, compositeurs, interprètes et ingénieurs du son qui m’ont permis d’illustrer différentes façons d’expérimenter la musique parmi tant d’autres.

En guise de finale, nous pouvons composer nous-mêmes et goûter au plaisir de la création. Pour un artiste amateur ou professionnel, rien n’est plus précieux que sa propre composition musicale, car elle exprime ses émotions les plus intimes. Partager et diffuser le produit de sa création peut se révéler carrément jouissif.

C’est avec une certaine émotion que je partage une composition de mon fils lorsqu’il avait 19 ans, intitulée « La Moldeva De Ma Vie » :

© Louis Marneth – Enregistrement déposé à la SABAM sous la référence 1109-00001-09286-8565. Version complète avec l’aimable autorisation du compositeur pour quotiz.com. Tous droits réservés.

Quelle expérience musicale aimeriez-vous partager ?

Maintenant, c’est à vous de jouer ! Les 21 exemples illustrés ci-dessus ne sont pas exhaustifs. Je vous invite donc à poster un commentaire ci-dessous, en décrivant une expérience musicale qui vous a particulièrement touché(e), et à copier le lien qui renvoie vers votre musique préférée, afin d’en faire profiter tous les lecteurs… D’avance, je vous remercie de votre participation !

Nous partageons tous la même planète… et pourtant…

S’il est évident que nous partageons tous la même planète, le simple fait de devoir le souligner pointe du doigt la regrettable vérité : nous l’oublions trop souvent.

© Comfreak www.pixabay.com

Nous sommes tous les habitants de cette bulle de vie au milieu du gigantisme. Avec chacun nos particularités, nous n’en sommes pas moins, tous, des êtres humains soumis aux mêmes lois du vivant et de la planète que nous peuplons. Nous avons tous les mêmes droits éthiques, issus de la « Déclaration Universelle des Droits de L’homme ». Nous avons tous les mêmes devoirs envers la vie, les autres et nous-même.

Cependant, nous ne cessons de nous déchirer, nous ne cessons de nous opposer les uns aux autres. Comme le dit Antoine de Saint-Exupéry, « Pourquoi nous haïr ? Nous sommes solidaires, emportés par la même planète, équipage d’un même navire. »

Apparait-il possible alors d’ouvrir une voie vers la paix, vers l’émerveillement et l’enchantement chers à Pierre Rabhi ?

Intrinsèquement semblables…

Que nous vivions dans les îles chaudes du Pacifique, sur les hauts plateaux tibétains ou dans les grandes plaines d’Afrique, nous sommes tous soumis aux mêmes contraintes physiologiques, et devons assouvir les trois fonctions fondamentales : se nourrir, se défendre et se reproduire. 

Nous sommes tous des organismes incarnés, animés par une âme, et un esprit, une intelligence, qui aspirent universellement aux mêmes quêtes de bonheur et d’Amour, aux quatre coins de la planète.

Chacun de nous vient au monde chargé de sa culture, de son environnement, de son milieu social, etc. À notre naissance, notre psyché n’est pas immaculée, mais bel et bien marquée du sceau de notre histoire familiale et culturelle. Depuis le début de l’histoire de l’humanité, les différentes régions du monde ont façonné les hommes qu’elles ont accueillis. Ces hommes ont alors érigé autour de leur groupe des croyances, des morales, des cultures pour bâtir leur identité, et leur appartenance à la communauté. Cette appartenance au groupe est indispensable aux hommes pour qu’ils puissent se construire de façon sereine et sécurisante. Nous parlons de racines, qui s’expriment tels des tuteurs, le long desquels les hommes vont pouvoir vivre et se développer, et par lesquels ils seront guidés.

… avec des dissemblances

Ces racines sont différentes pour chaque groupe d’humains, et font émerger des points de vue très divers sur la vie et l’organisation du monde. 

Cette diversité culturelle, qui s’exprime à plusieurs échelles, est une immense richesse ; elle représente le trésor de l’humanité, telles les facettes parfaites d’un diamant poli. Chaque facette isolément est une merveille, qui est transcendée dès lors qu’elle est observée au milieu des autres.

Cette diversité culturelle, si elle est une richesse, a cependant dérivé et fait émerger des sectarismes prononcés, et des rejets plus ou moins marqués par les hommes. Chacun, imprégné de son acquis, condamne, juge, et rejette celui qui n’a pas les mêmes imprégnations originelles, celui qui est différent…

De là naissent alors le repli identitaire, le communautarisme et toutes leurs dérives violentes et intolérantes. C’est à partir de là que l’homme oublie que « nous partageons tous la même planète ». Il va condamner l’autre, et faire de la lutte contre ses idéaux qu’il juge mauvais le combat de toute une vie. Chacun veut imposer à l’autre sa croyance, le convertir, l’asservir et le dominer, par peur de ne plus exister, niant ainsi la connexion originelle qui le lie à tous et au Tout. Mais est-il si important au fond que l’autre ait les mêmes idées que moi pour qu’il soit mon ami ? Suis-je obligé de condamner l’autre parce que son point de vue ne correspond pas au mien ? Suis-je obligé de forcer l’autre à penser comme moi pour le laisser exister ?

Vers un ego « solidaire », et non « solitaire »

L’homme est tripartite : un corps, un esprit et une âme. Le corps enveloppe l’esprit, qui lui-même enveloppe l’âme. 

L’une des composantes de l’esprit est l’ego, qui désigne la représentation de la conscience de soi et constitue le fondement de la personnalité. Un ego sain et structuré accompagne l’homme vers l’harmonie, la bienveillance et la paix intérieure. Malheureusement, l’ego est trop souvent écorché ou souffrant. Alors, il étouffe l’expression intime de l’âme, et guide les interventions de l’homme vers des mécanismes de replis sur soi et de peur. Et loin de prendre conscience de son lien avec les autres, l’homme s’en coupe et oublie que « nous partageons tous la même planète ». 

L’ego et ses souffrances enveloppent l’âme, et selon les « couches » plus ou moins épaisses qui le composent, il sera plus ou moins en mesure de l’asphyxier. Alors, la peur remplace l’Amour et les hommes se scindent.

L’ego ne vise que son but, sans se soucier du chemin. Pourtant, sur ce chemin, l’ego va couper les liens de l’homme aux autres, et l’isoler. L’expression de l’être profond lié au Tout, celui qui sait et vit que « nous partageons tous la même planète » est inhibé par un ego narcissique « destructeur de connexions ». L’ego accompagne les actions de chacun vers l’incohérence et l’irresponsabilité, et nie le fait que nous sommes tous liés.

Pourtant, Victor Hugo a écrit : « Rien n’est solitaire, tout est solidaire. »

L’éducation pour apprendre à ouvrir son coeur…

Le monde de demain s’écrit aujourd’hui. Des actions de plus en plus nombreuses menées à travers le monde en faveur de l’éducation montrent que l’homme prend progressivement conscience de l’imbrication très forte qui existe entre la misère du corps et celle de l’esprit. L’illettrisme, par exemple, n’est jamais dissociable de l’assujettissement et de l’avilissement de l’homme à sa culture, à son milieu, ou même aux autres hommes.

Einstein a écrit : « Nous passons quinze ans à l’école et pas une fois, on nous apprend la confiance en soi, la passion, et l’amour qui sont les fondements de la vie. » L’école d’aujourd’hui explique à ses élèves comment se couper des autres. Elle leur impose de travailler seuls, isolés, sans demander ni apporter d’aide à son voisin sous peine de sanction et de jugement. Elle apprend la compétitivité, mais pas le dépassement, elle apprend à être meilleur que les autres mais pas meilleur que soi-même. 

L’école apprend le jugement. Et comme le dit Boris Cyrulnik, « le jugement dissout les liens sociaux ». Une réflexion est menée depuis quelque temps sur les notes qui sanctionnent, et qui devraient être remplacées par des couleurs. Mais quelle est la différence entre une mauvaise note et la couleur rouge ? La signification est la même. L’école cherche à éviter de mettre les élèves en situation d’échec. Mais seul l’échec construit !

Plutôt que de vouloir nier l’échec, et de le juger, plutôt que de condamner l’élève qui n’a pas acquis la connaissance ou la compétence, pourquoi ne pourrions-nous pas le mettre face à son échec, sans le juger, simplement en lui donnant les outils pour qu’il le positive et lui permette de s’enrichir. Alors, l’enfant ne ressentira pas la honte de son échec que lui offre aujourd’hui l’école, honte qui blesse son ego et le coupe des autres. Pourquoi ne pas le mettre face à son échec avec bienveillance, et le lui faire assumer ? Alors il mettra en place des systèmes pour le résoudre, accompagné par ses éducateurs, qui ne devraient être là que pour le guider, non pour le sanctionner… L’élève prendra alors conscience qu’il n’est ni jugé, ni seul, et ses liens vitaux aux autres se renforceront. Il vivra plus que jamais intensément le fait que « nous partageons tous la même planète ».

La laïcité : l’acceptation de toutes les religions

Une autre arme de destructions des liens unissant les jeunes aux autres et au reste du monde, est la laïcité, si chère à nos sociétés contemporaines. 

La laïcité, qui à l’origine scelle une démarche d’acceptation de tous les cultes, observe aujourd’hui l’effet inverse. Au lieu d’unifier, elle divise. Elle nie les religions, veut les étouffer, les condamne, les rejette. Et dans la mesure où la religion signe une partie de l’identité, la laïcité en tant que rejet, aujourd’hui blesse l’ego, l’agresse, d’où toutes ces tensions autour d’elle.

Par le rejet des signes religieux dans les écoles, par la suggestion de ne plus installer de crèches pour les fêtes de Noël, ou encore de renommer les vacances scolaires, l’on enseigne à nos jeunes, au nom de la laïcité, à bannir l’autre et sa différence, à le nier dans sa vérité profonde. On coupe chacun de l’autre, on répudie ses liens à l’autre.

Vers une école de l’Amour

L’école ne devrait-elle pas plutôt enseigner le respect et l’acceptation de la différence ? Ne devrait-elle pas mettre en valeur la richesse de la diversité ? Ne devrait-elle pas renforcer le lien de chacun aux autres au lieu de le couper ?

L’école ne devrait-elle pas être le lieu où l’on guide les jeunes vers la découverte d’eux-mêmes, de ce qu’ils sont fondamentalement, où on mettrait en valeur que l’Amour dont ils sont tous bâtis et le lien qui les unit aux autres est le « fondement même de la vie. » ?         Peut-être qu’un nouvel enseignement devrait mettre l’accent sur le « développement harmonieux » de l’être, cher à Einstein, qui permettrait à chacun de renforcer son lien aux autres et au Tout ? Ne devrions-nous pas arrêter de fermer nos jeunes aux difficultés qu’ils rencontrent, mais plutôt les accompagner dans une démarche de responsabilisation, pour les aider à vivre leurs difficultés, à les assumer et à trouver une aide dans l’autre. Ainsi, ils garderaient à l’esprit constamment que « nous partageons tous la même planète ».

Texte rédigé par Emmanuelle Salesse.

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